lundi 9 novembre 2009

Le prix de la Terre promise


Que nous apprend l'acquisition de la grotte de Makhpéla ?

Le champs de Makhpéla

Sans posséder la moindre parcelle de la Terre de Canaan, Abraham a vécu plus de soixante ans avec la promesse réïtérée que ce pays, en entier, lui appartiendra. Il se considère toujours comme un « guer vétoshav », un « etranger et un habitant ». La première fois qu’Abraham acquiert un terrain en Canaan, c'est une sépulture pour sa femme Sarah. C’est là qu’il sera lui aussi enterré ainsi qu’Isaac et Rébecca, Jacob et Léa. Pour le midrash, cette épisode illustre la foi inébranlable d'Avraham en l'E-ternel :
« Viens et observe l'humilit é d'Abraham notre père. Le Saint, béni soit-Il lui a promis ainsi qu'à sa descendance de lui donner le pays pour toujours et maintenant il n'a pu trouver une sépulture pur Sarah qu'à un prix très élevé. Il n'a pourtant pas douter des attributs divins... » (Midrash haggadol)
La Tora nous raconte l’achat dans le détail. Au point que les tractations concernant cette acquisition semblent prendre plus d'importance que la mort et l'enterrement de Sarah. Abraham tient à tout prix, au sens propre, à acheter la grotte de Makhpéla et ne surtout pas la recevoir en cadeau. Il paye donc 400 sicles d'argent à Efrone le hittite devant tous les habitants de la ville.

Le champs de Anatot

En cherchant à reconnaître la validité de l'argent comme moyen de mariage, le Talmud la déduit de l'acquisition par Abraham du champs de Makhpéla. Cet acte est une des deux seules sources bibliques citées par le Talmud (Qiddoushin 2) à la validité de l'argent comme moyen d'acquisition. La deuxième se trouve dans le livre de Jérémie.

מתני'. האשה נקנית בשלש דרכים, וקונה את עצמה בשתי דרכים. נקנית בכסף (...) וכסף מנ"ל? גמר קיחה קיחה משדה עפרון, כתיב הכא: (דברים כב) "כי יקח איש אשה," וכתיב התם: (בראשית כג) "נתתי כסף השדה קח ממני", וקיחה איקרי קנין, דכתיב: (בראשית מט) "השדה אשר קנה אברהם", אי נמי: (ירמיהו לב) "שדות בכסף יקנו..."

Pendant quarante ans, ce prophète annonce la destruction du Temple à un peuple qui ne le croit pas. Finalement, comme il l'avait annoncé, les chaldéens font le siège de Jérusalem après avoir dévasté le pays. Jérémie est alors emprisonné à Jérusalem. C’est à ce moment que l’E-ternel demande à Jérémie de racheter un terrain vendu par son oncle. Là encore, les moindres détails de la transactions nous sont relatés. Cet acte est surprenant. Qui voudrait acheter un champs à Anatot, au Nord de Jérusalem, alors que les chaldéens ont envahi le pays, les juifs sont reclus à Jérusalem et que d'ici peu la ville va tomber, le Temple va être détruit et le peuple massacré ou déporté à Babylone ? Dans ce contexte, précisément, l'acquisition du champs de Anatot par Jérémie prend une autre dimension. Cet achat, par un prisonier d'une ville assiégée et bientôt détruite est accompagné d'une prophétie. Voici les derniers versets :
« Et l’on achètera des champs dans ce pays dont vous dites : il est dévasté, il n’a plus ni homme, ni bête, il est livré à la main des Chaldéens ; ils achèteront des champs pour de l’argent, on écrira un acte et on le scellera, on fera témoigner les témoins, au pays de Benjamin et aux environs de Jérusalem, (…) quand je ramènerai leurs captifs – oracle de l’E-ternel. » (Jérémie 32)

Mériter la promesse

Les deux transactions trouvée par le Talmud dans la Bible sont donc la première et la dernière acquisition d'une parcelle de la Terre promise par l'E-ternel, l’une au début de l’histoire d’Israël, l’autre avant la destruction du Temple et la déportation. Elles ont une valeur symbolique très forte. Abraham et Jérémie expriment ainsi à la fois leur lien indéfectible à cette Terre et le recul qu’ils ont pourtant du et su entretenir avec elle durant leur vie. Pour eux, la promesse relative à la Terre ne leur octroie ni droits ni assurances, au point d’y vivre comme Abraham en étranger, et de s’attendre comme Jérémie à en être tragiquement dépossédé.
La promesse les contraint à toujours se sentir concerner par cette Terre en sachant les devoirs à accomplir pour la mériter. Comme pour un mariage, l'acte premier de mariage, symboliquement exprimé par la remise d'un objet de valeur (l'anneau), ne fixe pas éternellement la relation entre l'homme et la femme. Il exprime au contraire le devoir de tout faire pur mériter la sainteté de cette relation.


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