vendredi 28 février 2014

Désobéissance féminine



Dans l’Antiquité et au Moyen age, le père est doté de ce que l’on qualifie de « puissance paternelle ». Femme(s) et enfants lui doivent respect et obéissance. Toute la société repose sur des rapports d’autorité et de soumission. Ainsi, la position du père à l’intérieur de la famille représente et garantie l’autorité du roi sur tous ses sujets. Cette situation est très bien illustrée dans un des premiers épisodes du Rouleau d’Esther.
Le Roi Ahashvérosh convie tous les habitants de Suze à un merveilleux festin. Tous les abus y sont permis et même recommandés. Au dernier des sept jours de ce festin, Ahashvérosh, réjouit par le vin, décide de montrer à tous ses invités plus encore que ses innombrables richesses. Il ordonne que la reine Vashti montre son extraordinaire beauté à tous les convives. La reine refuse de s’humilier ainsi, entraînant la colère du roi. Il demande alors conseil à ses ministres. Mémoukhan prend la parole. Il prend soin de bien expliquer la gravité de la situation :
« Ce n’est pas seulement contre le roi que la reine Vashti a mal agi, mais c’est contre tous les chefs et contre tous les peuples qui sont dans toutes les provinces du roi Assuérus. (…) Et dès ce jour-même, les princesses de Perse et de Mèdie qui ont appris cette action de la reine, en parleront à tous les chefs du roi ; d’où mépris et colère. »
En somme, le ministre explique au roi que l’affaire Vashti dépasse de loin un problème intérieur au palais. Si le roi n’agit pas comme il se doit, une révolution risque de détruire les années d’efforts, de guerres, de diplomatie et de festin qui lui ont été nécessaires pour conquérir puis pacifier les 127 provinces de son empire. Le roi doit comprendre que la « libération de la femme » n’est pas qu’une affaire privée. Toute la société, depuis ses fondements, s’écroulera si l’on n’arrête pas le mouvement immédiatement. En conséquence, une ordonnance royale doit être publiée afin que toutes les femmes aient du respect pour leurs maris.
« Alors le roi envoya des lettres dans toutes le provinces – pour chaque province selon son écriture, et pour chaque peuple selon sa langue -, afin que tout homme fût maître dans sa maison et parlât la langue de son peuple. »
Il est intéressant de remarquer que cette vision du respect du mari est exprimé dans la méguila par des personnages mal considérés. Un rapprochement troublant est d’ailleurs à faire entre cet épisode et celui où Haman demande d’exterminer tous les juifs « du plus jeune au plus vieux, enfants et femmes en un seul jour ». Il s’agit là encore de défendre les intérêts de l’immense et si puissant empire perse mis en danger par un si petit peuple. Doués d’une étonnante lucidité, les conseillers d’Ahashvérosh craignent plus que tout les gens dont la faiblesse et la soumission naturelles masquent une vitalité, une intelligence, une puissance bien plus grande que la force brute des hommes, des armes et des richesses.
Or précisément dans la méguila, les masques finissent par tomber. Le peuple humilié retrouve gloire et joie. Les femmes soumises acquièrent, par Esther, la preuve que toute un empire peut être habilement dirigé par l’intelligence d’une femme.

D. se cache dans la mégila, son action apparaît par l’assistance qu’il accorde toujours aux opprimés.

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