vendredi 28 février 2014

Souviens-toi de Amaleq

AVERTISSEMENT : L'article qui suit relate des faits imaginaires et complètement irréalistes, quoique...

L'affaire a commencé le 1er avril dernier par une question tirée au hasard à l'ONU : Faut-il assimiler « judaïsme » à « racisme » ? En effet un verset de la Tora impose d'effacer le souvenir du peuple de 'Amaleq. Une commission a été créée. Elle est rapidement parvenue aux conclusions suivantes :

  1. Voilà près de 4000 ans, le petit peuple de 'Amaleq habite dans les montagnes au Nord du désert du Sinaï et vit de brigandage. Il pille les caravanes et s'attaque parfois même aux villes, quand l'Etat est faible. Les philistins et les hébreux ont été les principales victimes de ce peuple.
  2. La première des attaques qui nous soit relatée dans la Torah, livre sacré des juifs, est celle qui suit la sortie d'Egypte. 'Amaleq attaque Israël sur son chemin vers la Terre de Canaan. Josué repousse l'assaut tandis que Moïse lève ses mains vers le Ciel.
  3. Aucun différend territorial ou politique n'oppose ces peuples. La responsabilité première de 'Amaleq semble donc avérée. Cependant, il est improbable qu'il ait eu l'intention de détruire Israël. En nombre bien inférieur aux millions d'hébreux, 'Amaleq attaque par l'arrière les personnes faibles à la traîne. C'est lâche, évidemment, mais le but de 'Amaleq n'est que de piller et de retourner dans ses villages fortifiés. L'opération défensive menée par Josué est donc légitime mais comment comprendre la suite ; une guerre éternelle est déclarée par D. à 'Amaleq ? Alors qu'Israël a le droit de pactiser avec l'Egypte qui l'a asservi pendant des siècles et assassiné ses enfants, point de trêve ou de repentance pour 'Amaleq ! Une guerre totale contre un peuple qui a opéré une razzia !
La commission de l'ONU a donc présenté une proposition de résolution condamnant la réaction disproportionnée du peuple d'Israël qui se rendrait en plus coupable de racisme et de crime contre l'Humanité. L'Etat d'Israël a donc été sommé de fournir des explications sur cette affaire.
L'Etat hébreu s'est déclaré incompétent en matière d'explication de la Tora et inapte à porter une responsabilité quant à son message. Ce à quoi le rapporteur de ladite commission, Ben Hameydata, de répondre que « sans sa Tora, le peu de légitimité de l'Etat d'Israël part en fumée ». Le gouvernement israélien a rappelé l'épisode de Haman, descendant de 'Amaleq, qui a tenté d'exterminer tous les juifs, hommes, femmes et enfants, en un seul jour. Hameydata a rétorqué que Haman n'a fait que rendre au peuple juif la monnaie de sa pièce puisque Saül, Roi d'Israël s'était, le premier, rendu coupable de génocide envers 'Amaleq quelques siècles plus tôt.
L'assemblée générale de l'O.N.U. a refusé de suivre toutes les conclusions de la commission, arguant que l'on ne peut « condamner un peuple sur la base de textes antiques dont la véracité n'est pas reconnue ». Elle a donc décidé de se rassembler le 15 mars prochain afin de procéder au vote de la résolution 5702 décrétant que « le judaïsme actuel est une forme de racisme et de discrimination raciale ».
Une tempête de réprobations envers le judaïsme s'est mise à souffler, depuis les dictateurs jusqu'aux esprits humanistes et pacifiques. Certains Etats ont demandé que soit ajoutée à l'encontre du judaïsme une condamnation pour « antisémitisme » puisque 'Amaleq est descendant de Sem et même d'Abraham et du fils aîné de Isaac.
A l'intérieur même des communautés juives les débats furent houleux. Des intellectuels juifs européens ont critiqué la Tora en s'étonnant d'une telle rancune envers de misérables pirates du désert. Ils ont réclamé que soient supprimés les versets compromettants. Quelques rabbins américains se sont empressés d'approuver cette requête. Ils ont même eu l'idée d'accomplir ainsi le verset : « Tu effaceras le souvenir de 'Amaleq »... de la Tora ! Mais presque toutes les autorités juives ont refusé de toucher au Pentateuque.
L'opinion publique internationale a été unanime dans sa critique : articles de presse, émissions télévisées, manifestations, boycotts, jamais l'attention du Monde ne s'est portée de manière aussi exclusive sur un seul sujet d'actualité. Les sites de recherche internet ont annoncés que plus de 80 % des requêtes dans le Monde portaient sur cette affaire.
Des ambassadeurs israéliens ont été renvoyés dans leur pays mais également des rabbins ont été expulsés ou interdits d'enseignement et des yéshivot, académies talmudiques, ont été fermées. Même le pacte entre les antisionistes juifs ultra-orthodoxes et non-juifs s'est brisé. Les premiers prétextant que ces versets étaient à prendre au sens symbolique puisque 'Amaleq n'existe plus, les seconds affirmant qu'aucun groupe ne peut se permettre de garder dans sa charte un appel à la destruction d'un peuple, fut-il symbolique. Un accord a failli être passé lorsqu'un rabbin antisioniste a déclaré que le peuple de 'Amaleq était aujourd'hui l'Etat sioniste mais peu ont voulu se démarquer de d'opinion générale sommant les juifs de faire disparaître les versets polémiques de la Tora et des manuels scolaires juifs.
Violemment critiquées de l'extérieur et de l'intérieur, les communautés juives ont finalement retrouvé leur unité mise à mal. Juifs de gauche et de droite, religieux ou non, sionistes ou pas, partisans de la force ou du dialogue, tous se sont rassemblés. Jamais une telle entente ne s'était réalisée. Une même réaction spontanée est alors apparue. Dans les synagogues, les lieux publiques, les rues, devant les caméras de télévision, les juifs se sont mis à lever les mains vers le Ciel à l'instar de Moïse lors de la guerre contre 'Amaleq.
On pourrait penser qu'en levant les mains vers D., ils baissent les bras devant la critique. Mais de l'avis des personnes interrogées, ce geste indique que, non seulement le salut ne vient que de D. mais également que l'agression du peuple de 'Amaleq est dirigée contre le D. d'Israël. En effet le contexte historique de l'attaque de 'Amaleq dans le désert permet de reconsidérer les premières conclusions de la commission. 'Amaleq s'est attaqué, il est vrai, à Israël comme à tout autre peuple mais à un moment particulier de l'Histoire de l'Humanité. Après des siècles d'exil et d'asservissement, le peuple d'Israël aurait du disparaître dans les limbes de l'histoire comme tant d'autres nations dominées. Or, de manière prodigieuse, ce peuple est sorti d'Egypte en y voyant la main de D.. Il a traversé la Mer Rouge qui s'est refermée sur l'armée égyptienne et a suivi Moïse dans le triangle du Sinaï, lieu désertique qui ne mène nul part. Aucune nation n'osait alors s'interposer sur le chemin du peuple d'Israël. C'est précisément sur ce chemin de la constitution du peuple d'Israël au service de son D. que 'Amaleq attaque, effectivement comme si de rien n'était. Car telle est l'opposition fondamentale entre ces deux peuples frères. L'un affirme qu'il existe un D. de l'Histoire, qui juge les humains pour leurs actions et intervient dans le cours des événements, le second s'oppose à l'idée d'une responsabilité devant D.. L'épisode extraordinaire de la Sortie d'Egypte semblait démontrer l'existence du D. d'Israël qui donne sens à l'Histoire, c'est la raison pour laquelle 'Amaleq se devait de réagir en « normalisant » l'histoire de ce peuple, en la réintégrant dans un monde sans autres lois que celles du hasard et des déterminismes naturels. Pour Israël, les événements historiques sont le masque derrière lequel D. se cache et par là-même révèle son Existence. Pour 'Amaleq, nulle victoire, nulle défaite, ne prouve un « maître du jeu ». Les cartes sont tirées au hasard, l'Histoire en est le résultat. 'Amaleq empêche donc d'asseoir D. sur le trône de Justice qu'Israël a le devoir de créer. A travers l'Histoire, l'existence même d'Israël, envers et contre tout, démontre l'existence d'un projet pour le Monde basé sur des lois de justice et d'égalité entre les humains et les peuples devant D.. Cela ne nie pas la réalité d'autres lois, d'autres « dialectiques » (le hasard, la nature, la force, etc..) mais cela implique qu'elles puissent être dominées, canalisées, guidées. De tout temps une réaction violente se produit, de l'extérieur comme de l'intérieur du peuple d'Israël. Une réaction tentant à se masquer le prodige, l'étendard divin, et à persister à ne considérer que les forces qui ne responsabilisent pas l'humain et ne le contraignent pas à choisir entre le Bien et le Mal.
Dans ce combat entre Israël et le descendant de son frère jumeau, Israël n'a pas d'autre arme que celle d'exister par ce qui le caractérise : Etre le peuple qui montre aux hommes le chemin du Ciel, sans se prosterner ni tenter de se cacher en pensant être épargné.

A. R.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Rechercher dans ce blog